Le marché des cryptoactifs connaît une notoriété exponentielle depuis ces dernières années. Etant donné qu’il s’agit d’une représentation de biens qui n’existent que sous forme de transactions numériques, lesdits actifs rompent les barrières physiques et, contrairement à la grande majorité des actifs régis par des organismes centralisés dans différents pays, ils peuvent être facilement négociés sur le plan extraterritorial. L’intérêt que portent les Brésiliens sur les cryptoactifs est également en hausse : selon la Commission des Valeurs Mobilières (CVM), en 2021, le nombre d’investisseurs en crypto-monnaies1 a augmenté de 938 % au Brésil.2 Cette croissance attire l’attention des autorités locales, précisément en raison de l’absence de réglementation dans ce domaine et des risques potentiels que ce marché peut présenter.
Au Brésil, la Banque Centrale (BC) a identifié, à maintes reprises, 3 les problèmes qui, pour l’organisme, mériteraient une plus grande attention, et qui impliquent en particulier les crypto monnaies. Parmi eux, on peut souligner, à titre d’exemple, le fait que les crypto monnaies : (i) ne font pas l’objet d’une réglementation ; (ii) n’ont pas leur valeur assurée par un mécanisme gouvernemental, ce qui fait que les risques incombent à ceux qui les détiennent ; (iii) ne peuvent pas être converties en une monnaie officielle réglementée par une autorité compétente ; (iv) leur valeur varie considérablement sur une courte période de temps ; (v) ne sont pas émises ou garanties par une autorité monétaire, et les entités impliquées dans leur émission ou leur négociation ne sont contrôlées par les autorités monétaires d’aucun pays ; (vi) peuvent provoquer des dommages irrémédiables pour leurs propriétaires, par exemple en cas de cyber-attaques, qui ciblent les serveurs sur lesquels elles sont stockées. Ces préoccupations sont tout à fait conformes à celles exprimées par d’autres autorités analogues dans le monde, comme la Banque de France, ayant fait part de leurs positions sur le sujet. 4
Bien qu’une partie considérable du marché et des investisseurs semble, a priori, résistante à une réglementation instituée par l’État, on observe aujourd’hui au Brésil un mouvement au sein du Congrès National, soutenu par des organismes liés au pouvoir Exécutif, tels que la Receita Federal (Trésor Public), la CVM et la Banque Centrale, en faveur de la création de lois qui réglementeraient les cryptoactifs. Le scénario actuel montre que compte tenu de l’augmentation significative des investisseurs en cryptoactifs, le gouvernement perçoit la nécessité d’une réglementation à ce sujet et indique que, dans le courant de l’année, un projet de loi devrait être approuvé au Brésil.
Les discussions sont orientées en vue d’établir des principes et des règles générales, afin d’assurer la sécurité juridique et la protection des investisseurs dans les cryptoactifs. Bien que certaines initiatives législatives proposent la création de règles spécifiques, le gouvernement défend l’approbation d’une norme de principe, voire une infra-réglementation, puisque le contexte technologique est en constante évolution.
Parmi les principaux exemples d’initiatives, il existe le projet de loi 3.825/2019 approuvé par le Sénat, le 22 février 2022, ainsi que celui 2.303/2015 également approuvé par la Chambre des Députés, le 8 décembre 2021. Du fait de l’approbation de deux projets portant sur le même thème, la discussion d’un accord entre députés et sénateurs est en cours, afin que les deux textes soient réunis.
Dans les grandes lignes, le contenu des Projets de Loi entérinés jusqu’à présent, établit que : (i) les exchanges d’actifs virtuels – ainsi sont considérées les entités qui effectuent des échanges entre actifs virtuels et monnaie ou entre elles, la garde ou la gestion d’actifs virtuels – doivent disposer d’une autorisation formelle pour opérer dans le pays ; (ii) les cryptoactifs peuvent être employés pour des paiements et des investissements ; (iii) les entités qui exercent des activités liées aux cryptoactifs doivent respecter les règles du droit de la consommation, de la protection des données personnelles et de la sécurité de l’information ; (iv) les activités liées aux cryptoactifs seront définies et réglementées par le Pouvoir Exécutif ; (v) des dispositions pénales spécifiques doivent être créées, afin de lutter contre la gestion frauduleuse ou risquée des cryptoactifs.
L’objectif d’une nouvelle réglementation est non seulement de mettre en évidence les règles du marché des cryptoactifs, mais aussi de limiter les fraudes, le blanchiment d’argent et les systèmes pyramidaux – qui s’enhardissaient jusqu’à présent, précisément par l’absence d’intervention de l’Etat. Nonobstant l’adoption imminente d’une loi à ce propos, l’évolution de la technologie, l’utilisation des produits cryptographiques à de nouvelles fins et les réglementations internationales tendent à influencer le rythme et la direction de nouveaux développements sur le plan législatif et réglementaire au Brésil, au cours des prochaines années.