10 janvier 2024 – BMA French Desk – BMA Advogados
La lutte contre l’inégalité salariale entre les hommes et les femmes est un thème de plus en plus récurrent dans le monde, étant à ce titre l’un des principaux sujets de discussion dans l’agenda de l’ESG (Critères Environnementaux Sociaux et de Gouvernance). Cette question a eu encore plus de répercussion au Brésil avec l’édition récente de la Loi 14.611, la “Loi sur l’Égalité Salariale” qui à l’instar d’autres législations internationales vient renforcer l’interdiction de critères discriminatoires pour définir la rémunération des travailleurs, particulièrement sur l’égalité salariale entre les hommes et les femmes. D’une façon générale, la loi introduit des modifications dans la Consolidation des Lois du Travail (CLT) et impose de sévères sanctions aux employeurs ne respectant pas les règles établies.
Parmi toutes les innovations, le point le plus controversé est certainement celui qui concerne l’obligation pour les personnes morales privées ayant au moins 100 employés de publier des rapports semestriels de transparence salariale et rémunératoire.
La question est polémique car même si les premiers rapports devront être présentés par les entreprises en 2024, la loi dispose de manière générique qu’ils devront inclure des données permettant la comparaison objective entre salaires, rémunérations et la proportion d’occupation des postes de gestion entre hommes et femmes, ainsi que d’autres éventuelles inégalités selon les races, les ethnies, les nationalités et les âges. Cependant, la loi n’a pas détaillé ni défini la forme de ces rapports, ni les canaux qui devront être utilisés pour leur publication. De plus, le non-respect de la loi pourra signifier l’application d’une amende (correspondant à 3% maximum de la masse salariale de l’employeur, limitée à 100 salaires minimums), en plus d’autres sanctions applicables.
Une autre question polémique est la prévision de présentation d’un plan d’action pour réduire toute inégalité vérifiée, avec objectifs et délais, ainsi que la garantie de participation des syndicats professionnels et de représentants des employés sur le lieu de travail.
Une partie des questions a été répondue par le Décret nº 11.795, du 23.11.2023, immédiatement complété par l’Ordonnance nº 3.714 du Ministère du Travail et de l’Emploi (“MTE”), du 24.11.2023.
Le premier point est que le rapport sera élaboré par le MTE lui-même – et non par les entreprises – à partir des données qui devront être saisies par ces dernières dans le e-Social, dans la section I du Portail « Emprega Brasil » et dans la section II (par le biais d’un onglet spécifique appelé « Égalité Salariale et des Critères de Rémunération » qui n’a pas encore été créé).
La réglementation précise également les données qui devront être saisies par les entreprises sur les deux plateformes. Ces données vont d’informations objectives, comme le nombre d’employés par société séparés par sexe, race et ethnie avec les salaires contractuels et rémunérations mensuelles respectifs, en plus des postes ou occupations ; jusqu’à des questions plus larges et complexes telles que les critères de rémunération adoptés par l’entreprise pour l’accès et la progression des employés et pour les promotions à des postes de gérance et de direction, entre autres.
Les mois de publication ont été définis : mars et septembre, pour les informations concernant le semestre en cours. Les entreprises devront par ailleurs diffuser leurs rapports, non seulement à leurs employés mais aussi au public en général, par le biais de publications sur leurs sites officiels et leurs réseaux sociaux. D’autre part, le délai d’implantation du plan d’action en cas d’identification d’inégalités salariale et de critères de rémunération, quels qu’ils soient, est de 90 jours à partir de la date de notification de l’auditeur fiscal.
S’il est vrai que la réglementation est opportune, il est indéniable qu’il subsiste d’innombrables doutes en suspens : de quels outils l’auditeur fiscal disposera pour conclure à l’existence d’inégalités dans les critères de rémunération ? Le respect des exigences pour l’égalité des salaires prévues dans l’article 461 de la CLT sera-t-il suffisant pour éloigner la caractérisation d’une éventuelle discrimination ?
Plus encore ! La réglementation a apporté de nouvelles polémiques : l’exigence de diffusion d’informations détaillées sur les montants et la composition de la rémunération de chaque employé avec l’indication de leurs postes, même anonymes, ne pourrait-elle pas aller contre les règles de la LGPD en permettant l’identification des employés, particulièrement dans les petites et moyennes entreprises ? Cette exigence ne pourrait-elle pas être considérée comme illégale (voire anticonstitutionnelle) du point de vue de la concurrence, puisque l’entreprise doit avoir le droit de préserver le secret de ses affaires ?
Même si l’insécurité juridique persiste, la loi est une réalité et elle est déjà en vigueur. Il est donc du ressort des entreprises de se préparer : soit en s’organisant en interne pour recueillir les données qui devront figurer dans le rapport, soit en analysant les éventuelles mesures qui pourront être adoptées pour minimiser les risques potentiels découlant de la présentation de ce rapport.
Auteurs :
Cibelle Linero – cml@bmalaw.com.br
Fernanda Rochael Nasciutti – fna@bmalaw.com.br
BMA French Desk – frenchdesk@bmalaw.com.br