03/10/2024 – Maître Liliane Soares – Cabinet LDPS Law
Avec la montée en puissance des préoccupations environnementales et sociales à l’échelle mondiale, le développement durable est devenu un élément central des politiques commerciales et économiques. Pour les entreprises brésiliennes qui souhaitent opérer en Europe, il est crucial de comprendre les cadres juridiques qui encadrent les pratiques durables, en particulier les critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance).
Ces normes ne sont plus seulement des recommandations, mais des exigences qui façonnent les stratégies d’expansion, en réponse aux attentes des régulateurs, des investisseurs et des consommateurs.
Les critères ESG regroupent des normes environnementales, sociales et de gouvernance que les entreprises doivent respecter pour répondre aux attentes des parties prenantes, surtout sur les marchés européens. De plus en plus encadrés par des régulations strictes, ces critères demandent aux entreprises d’adopter des pratiques respectueuses de l’environnement, de garantir les droits humains et de maintenir une gouvernance transparente.
Les aspects environnementaux concernent la gestion des ressources, la réduction des émissions de carbone et la protection de la biodiversité. Les pratiques sociales incluent les responsabilités en matière de droits humains, les conditions de travail et le respect des communautés locales. La gouvernance englobe la transparence, la gestion des risques et la lutte contre la corruption.
Le cadre Juridique Européen
L’Union Européenne s’est imposée comme un leader mondial dans la régulation des pratiques durables. Le Green Deal Européen, lancé en 2019, a pour objectif de faire de l’Europe le premier continent neutre en carbone d’ici 2050. La Taxonomie Verte de l’UE définit les critères pour déterminer quelles activités économiques peuvent être considérées comme durables, obligeant les entreprises opérantes ou investissant en Europe à démontrer leur conformité.
Le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières, qui doit être progressivement mis en place d’ici 2026, prévoit d’imposer une taxe sur les produits importés en fonction de leur empreinte carbone, impactant notamment les exportations brésiliennes de produits à forte intensité carbone.
Par ailleurs, la Directive sur le Devoir de Vigilance impose aux entreprises de surveiller l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement pour garantir le respect des normes sociales et environnementales, les rendant responsables des violations potentielles.
Le Cadre Juridique Brésilien
Au Brésil, bien que des défis significatifs subsistent en matière de protection environnementale, un cadre réglementaire visant à intégrer les principes de durabilité est également en développement.
La Politique Nationale sur les Changements Climatiques, adoptée en 2009, encourage la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des pratiques plus respectueuses de l’environnement.
Le cadre juridique brésilien inclut également la Loi sur les Crimes Environnementaux, qui impose des sanctions aux entreprises et individus responsables de dégradations environnementales.
De plus, la Loi Générale sur la Protection des Données, bien que centrée sur la protection des données personnelles, impose des obligations aux entreprises traitant des informations liées à la biodiversité, un enjeu crucial pour un pays aussi riche en biodiversité que le Brésil.
Cependant, la mise en œuvre de ces lois demeure un défi, surtout dans les secteurs de l’agriculture intensive et des industries extractives, où les pressions économiques peuvent entrer en conflit avec les objectifs de durabilité.
Pour les entreprises brésiliennes cherchant à pénétrer le marché européen, il est impératif de se conformer aux normes ESG de plus en plus strictes. La durabilité devient non seulement une condition d’accès au marché, mais également une nécessité pour rester compétitif.
Malgré ces défis, des opportunités importantes émergent pour les entreprises brésiliennes capables d’adopter des stratégies durables. L’investissement dans les technologies vertes, la transition vers les énergies renouvelables et l’agriculture durable peuvent offrir un avantage concurrentiel significatif.
Le Brésil, avec ses vastes forêts et écosystèmes uniques, est bien placé pour jouer un rôle majeur sur le marché des crédits carbone, permettant aux entreprises d’investir dans la reforestation ou la préservation des écosystèmes et de monétiser ces efforts sur le marché européen du carbone.
Enfin, les entreprises brésiliennes qui démontrent un engagement solide en faveur de la durabilité peuvent attirer des investissements étrangers, les critères ESG étant désormais déterminants pour de nombreux investisseurs internationaux.
En somme, les implications juridiques du développement durable dans les échanges entre le Brésil et l’Europe sont vastes et en constante évolution. Pour les entreprises brésiliennes, intégrer les critères ESG dans leurs pratiques commerciales ne constitue pas seulement un impératif de conformité, mais également une opportunité de se positionner de manière avantageuse sur le marché européen.
En adoptant des pratiques respectueuses de l’environnement, en renforçant la transparence et la responsabilité sociale, et en se conformant aux réglementations en vigueur, elles pourront non seulement éviter les sanctions, mais aussi capitaliser sur de nouvelles opportunités commerciales et d’investissement.
Maître Liliane SOARES