Des mesures prises pour l’endiguer la pandémie du coronavirus ont un impact direct sur les contrats en cours. En France et au Brésil, des mesures de fermeture des établissements commerciaux non essentiels ont été prises ainsi que des restrictions à la circulation des personnes. Dans ce contexte, le cours normal des contrats a été troublé et les prestations de certains contrats ont été interrompues.
En France, des mesures spécifiques concernant le payement des loyers et des charges ont été prises. Néanmoins, elles concernent seulement les entreprises pouvant bénéficier du fonds de solidarité, ce qui limite considérablement leur champ d’application. À son tour, le Brésil n’a pas encore pris des mesures spécifiques pour ces contrats.
Les acteurs économiques cherchent ainsi des mécanismes de droit commun qui peuvent être utilisés pour suspendre leurs obligations pendant cette crise. Trois dispositifs de droit commun peuvent être soulignés : la force majeure, l’imprévision et l’exception d’inexécution.
La force majeure
La force majeure est l’un de ces mécanismes à disposition des entreprises, notamment celles faisant l’objet des mesures sanitaires de fermeture.
En France, l’article 1218 du Code civil dispose qu’Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
La pandémie et les mesures sanitaires conséquentes constituent incontestablement des événements qui échappent au contrôle des parties et qui ne pouvait être raisonnablement prévus.
Le prestataire devra prouver que les mesures prises par le gouvernement lui ont empêché d’exécuter son obligation, ce qui n’est pas le cas de celles pouvant être effectuées à distance, sans risque sanitaire.
Au Brésil, l’article 393 du Code civil exonère également le débiteur qui n’est pas en mesure d’exécuter ses obligations pour raison de force majeure.
Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations sans qu’il y ait lieu à des dommages et intérêts.
Il faut noter que les parties peuvent écarter ou aménager les conséquences de la force majeure dans leur contrat. Il convient donc de vérifier que le contrat ne contient pas de dispositions dérogatoires à la force majeure.
L’imprévision
L’imprévision est aussi un mécanisme qui peut être invoqué par les entreprises pendant cette crise.
En France, l’article 1195 du Code civil dispose que si un changement de circonstances imprévisible, lors de la conclusion du contrat, rend l’exécution excessivement onéreuse pour l’une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant.
Selon la date de conclusion du contrat, l’imprévisibilité sera assez facilement admise. Il reste à prouver que la pandémie a rendu l’exécution du contrat excessivement onéreuse pour la partie qui l’invoque et que l’imprévision n’a pas été écartée dans le contrat.
Pendant la renégociation du contrat, les parties continuent à exécuter leurs obligations. En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou soumettre la question au tribunal. À défaut d’accord dans un délai raisonnable, le tribunal peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe.
Au Brésil, l’article 478 du Code civil prévoit un dispositif similaire, mais qui n’oblige pas à la renégociation du contrat, permettant aux parties de demander directement au juge sa résolution.
L’exception d’inexécution
L’exception d’inexécution, prévue en France par l’article 1217 et au Brésil par article 476 des Codes civil respectifs, permet à la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, de refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation.
Une partie n’est pas obligée de maintenir son obligation, notamment de payer, en cas de défaut de l’autre partie qui n’exécute pas le service. Ainsi, les services qui ne sont pas rendus ou les produits qui ne sont pas livrés en raison de la pandémie n’ont pas à être payés.
Il faut noter que la partie qui n’exécute pas sa prestation ne peut pas invoquer la force majeure pour continuer à être payée pendant la suspension du contrat. La partie défaillante pour cause de force majeure ne peut exiger de l’autre qu’elle continue à exécuter ses propres obligations.
Conclusions
Avant de mettre en place l’un de ces dispositifs de droit commun, il est recommandé que les parties cherchent à négocier auparavant leur contrat.
Un agissement unilatéral et sans préavis peut entraîner à la requalification ultérieure par le juge de ces dispositifs, et cette partie pourra avoir à supporter des frais de résiliation, des éventuelles sanctions et des dommages et intérêts.
LinkedIn : Orlando Vignoli Neto