Bulletin Juridique

Dénomination sociale, nom de fantaisie et marque déposée au Brésil

07/11/2023 –  Louis Lozouet – Venturini IP

Au Brésil, la « dénomination sociale » et la « marque » constituent des instituts juridiques différents. Alors que la dénomination sociale est protégée par le Code civil brésilien (loi nº 10.406 du 10/01/2002) et correspond au nom donné à une entreprise pour qu’elle puisse exercer une certaine activité économique, la marque est soumise aux règles qui découlent de la loi sur la propriété industrielle (loi nº 9.279 du 14/05/1996), et correspond à un signe distinctif qui identifie et distingue produits et services sur le marché.

La dénomination sociale est enregistrée auprès du Registre du Commerce et peut correspondre au nom des associés ou à un nom de fantaisie représentant l’activité de l’entreprise.

La marque, quant à elle, est enregistrée auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), organisme en charge de veiller à la protection et au respect des droits de propriété industrielle au Brésil. Elle constitue un signe distinctif, visuellement perceptible, capable d’identifier et de distinguer des produits ou services similaires d’origines différentes.

L’une des principales différences entre les deux est que la dénomination sociale ne garantit pas l’exclusivité d’utilisation. Cela signifie que d’autres entreprises peuvent utiliser un nom commercial similaire, voire identique, si elles sont enregistrées auprès de Registres de Commerce d´États différents. La marque, quant a elle, garantit l’usage exclusif du signe distinctif sur l´ensemble du territoire brésilien, empêchant d’autres sociétés d’utiliser des signes similaires ou identiques dans des secteurs d’activité identiques ou similaires. En outre, la marque peut faire l’objet d’une licence ou être transférée à une autre société, contrairement à la dénomination sociale.

En ce qui concerne les différences entre le « nom de fantaisie » et la « marque », il est important de noter que lors de l’enregistrement d’une dénomination sociale, l’entrepreneur pourra choisir un nom de fantaisie qui bénéficiera de la même protection juridique que la dénomination sociale auquel il est lié. Alors que la dénomination sociale est le « nom officiel » de l’entreprise, qui apparaîtra dans ses documents légaux (factures, contrats, compte bancaire), le nom de fantaisie correspond au « nom de l’établissement », qui sera affiché sur la devanture d´un magasin ou sur l´étiquette d´un produit. Si la dénomination sociale n’est pas soumise à un enregistrement en tant que marque auprès de l´INPI, les éléments de fantaisies qu’elle peut contenir le sont.

En pratique, bien que le nom de fantaisie exerce la même fonction que la marque en distinguant les produits ou services d´autres de même nature ou de nature similaire, il n’offre pas de protection juridique en tant que marque déposée. L’enregistrement de la marque auprès de l’INPI est la procédure légale qui protège le signe distinctif de l’entreprise contre toute utilisation non autorisée par des tiers sur l´ensemble du territoire national.

Cependant, même si la « marque » et la « dénomination sociale » sont des instituts juridiques distincts, il existe une relation entre eux dans le monde des affaires, raison pour laquelle la loi sur la propriété industrielle, visant à éviter toute confusion dispose en son article 124, paragraphe V, que la reproduction ou l’imitation d’une caractéristique ou d’un élément différentiateur du titre d’établissement d´un tiers ne peut être enregistrée comme marque, puisque susceptible de créer un risque de confusion avec le signe distinctif correspondant.

Concernant la dénomination sociale des sociétés étrangères, l’article 8 de la Convention de l’Union de Paris (CUP), dispose que « le nom commercial sera protégé dans tous les pays de l’Union sans obligation de dépôt ou d’enregistrement, qu’il fasse ou non partie d’une marque ou d’une marque de fabrique ou de commerce ».

En cas de résolution de conflit entre la dénomination sociale et la marque, les aspects suivants pourront être pris en compte : (i) si l´élément qui intègre le titre de l’établissement ou la raison sociale est distinctif ; (ii) si la marque remplit les conditions de distinctivité, de légalité et de véracité ; (iii) si la similitude entre les marques en question est susceptible de créer une confusion ou une association indue ; (iv) si les activités exercées par le titulaire du nom commercial ont une affinité marketing avec les produits ou services indiqués par la marque ; et (v) si l’enregistrement de la dénomination sociale est antérieur au dépôt de la marque.

En outre, deux principes seront également pris en compte : (i) Spécialité – afin de vérifier si les entreprises en conflit opèrent dans le même domaine d’activité; (ii) Territorialité – afin de vérifier si les entreprises en conflit opèrent sur le même territoire. Ainsi, si les éléments identifiants de la dénomination sociale et de la marque ne prêtent pas à confusion, bien que similaires, car leurs titulaires opèrent dans des secteurs économiques différents et dans un périmètre territorial différent, l´INPI ainsi que les tribunaux retiendront la possibilité d’une coexistence entre eux.

En résumé, l’enregistrement d’une marque reste la forme de protection juridique la plus sûre pour un signe capable d’identifier les produits ou services d’une entreprise. Ses principaux avantages étant : (i) l´exclusivité d’usage du signe distinctif sur tout le territoire national ; (ii) le transfert de propriété dans le cadre d’une licence d´usage ou d´une cession de droits à une autre société ; et (iii) une plus grande protection juridique en cas de violation des droits.

Cet article est le premier d´une série de deux articles sur le droit des marques au Brésil.

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