Bulletin Juridique

Mars 2020 – Article n°7

Le régime juridique de l’autoconsommation photovoltaïque au Brésil

Guillaume Dolidon et Natasha David

Dolidon Partners, société d’avocats

Depuis l’adoption du « Net Energy Metering » en 2012, l’énergie photovoltaïque
autoconsommée au Brésil a connu une très forte expansion

Le Brésil, pays qui connaît l’un des plus hauts niveaux d’irradiation dans le monde, a
récemment annoncé le déploiement d’investissements de plusieurs milliards d’euros
d’ici 2026-2027, pour accroître la puissance du parc électrique solaire et l’étendue de
son système de transmission.

1. A l’instar des Etats-Unis et de quelques pays européens, le Brésil a adopté en
2012 le modèle dit du « Net Energy Metering », qui permet aux consommateurs de
compenser partiellement leur consommation d’électricité par la production d’une
installation (de source renouvelable) exploitée sur leur site de consommation. Depuis
le 17 avril 2012, date d’entrée en vigueur de la résolution normative 482/2012 de
l’ANEEL (Agence de réglementation de l’électricité du Brésil), les brésiliens peuvent
en effet produire leur propre électricité à partir de sources renouvelables, et fournir le
surplus de l’énergie produite au concessionnaire du réseau en contrepartie de l’octroi
d’un crédit d’énergie (utilisable pendant 60 mois).

2. L’introduction de ce modèle de compensation a marqué un point de départ
fondamental dans le développement de l’énergie photovoltaïque au Brésil. Le Net
Metering symbolise en effet la naissance d’un marché libre de l’énergie, qui permet à
tous les consommateurs (entreprise ou particuliers) de produire leur propre électricité,
activité jusqu’alors strictement centralisée et régulée par les autorités. Cette liberté de production reste cependant limitée en termes de volume puisqu’elle s’exerce au travers de deux régimes, (i) la « micro-génération », pour les installations d’une
puissance inférieure ou égale à 75 kilowatts, et (ii) la « mini-génération », pour les
installations d’une puissance supérieure à 75 kilowatts et inférieure ou égale à 5
mégawatts.

3. Avec l’adoption du Net Metering, l’énergie photovoltaïque au Brésil a connu une
incroyable expansion en très peu de temps puisque, grâce à ce système, la production
photovoltaïque cumulée, uniquement générée via ce système de compensation, était
estimée début 2020 à plus de 2 gigawatts.

4. Initialement limitée à la production directe d’énergie par un consommateur sur
son lieu de consommation, et l’utilisation des crédits sur ce même lieu, le système de
compensation, depuis une réforme de 2015, s’applique désormais entre unités de
production et unités de consommation distinctes. Cette modification a permis de
multiplier les schémas de compensation, tels que notamment l’autoconsommation à
distance, la production partagée, ou encore la compensation au profit d’unités de
consommation multiples.

5. L’autoconsommation à distance se caractérise par des unités de production et
de consommation qui sont la propriété d’un même consommateur, mais qui sont
installées dans des zones géographiques distinctes, permettant ainsi la compensation
entre les unes et les autres, pour autant qu’elles se situent dans la même zone deservice du distributeur (ce qui peut signifier le même Etat). La production partagée se
caractérise par la réunion, via un consortium ou une coopérative, de plusieurs
personnes (au sein d’une même zone de concession de distribution électrique) qui
possèdent ensemble des unités situées dans un endroit distinct des unités de
consommation au profit desquelles les crédits d’énergie seront utilisés. Quant aux
unités de consommation multiples (on vise les copropriétés notamment), elles visent
les installations destinées à approvisionner des zones communes qui constituent des
unités de consommation distinctes, à condition qu’elles se situent sur le même terrain
ou sur des terrains contigus. Ce schéma permet aux copropriétés de répartir les
crédits d’énergie entre elles.

6. Ces différents systèmes de compensation offrent de nombreuses opportunités
pour les investisseurs et acteurs de l’industrie photovoltaïque (locaux ou étrangers)
dans la mesure où, dans ces schémas, les consommateurs ne sont pas
nécessairement propriétaires de leurs unités de production, qui ne sont par ailleurs,
pas nécessairement installées sur leur lieu de consommation, mais au sein de zones
qui peuvent êtres très vastes dans un pays comme le Brésil. Cette situation favorise
le développement de modèles d’affaires tels que les contrats de mise à disposition
d’unités ou de location-vente d’installations photovoltaiques, au profit d’entreprises
utilisatrices dont la part du coût électrique dans les charges est très significatif au
Brésil, et toujours en constante augmentation.

7. Parmi les défis pour les investisseurs, il faut cependant considérer les coûts
élevés (matériel et main d’oeuvre), ainsi que certaines incertitudes qui demeurent sur
le plan fiscal et réglementaire. Néanmoins, le gouvernement brésilien a récemment
annoncé l’adoption prochaine d’un ensemble de mesures favorables à
l’accompagnement de la croissance de l’énergie photovoltaïque dans le pays, avec
des investissements significatifs et le souci de renforcer la sécurité juridique, la
prévisibilité et la transparence pour le marché et pour les investisseurs.

Guillaume Dolidon et Natasha David

Dolidon Partners, société d’avocats

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